Le bonheur conjugal - Tahar Ben Jelloun *****

Indéniablement, si je devais résumer Le bonheur conjugal de Tahar Ben Jelloun en peu de mots, je préciserais que le jury de l'Académie Goncourt a réalisé un roman d'introspection parfait. Il faut dire que Monsieur ne s'est pas donné la tâche facile. Entre ses nombreuses citations de la magnifique série télévisée Scènes de la vie conjugale d'Ingmar Bergman et le titre (déjà employé lors d'une nouvelle de Léon Tolstoï), les références cinématographiques et littéraires illustrent ce grand livre, jusqu'au sous-titre L'homme qui aimait trop les femmes (clin d’œil éventuel à François Truffaut, peut-être un peu moins au suédois Stieg Larson. Je n'ose énoncer une allusion actuelle à Berlusconi ou à DSK).
Le bonheur conjugal dissèque le couple formé par un peintre fazzi illustre et sa femme Amina : leur rencontre, leurs premières disputes, leur évolution jusqu'à l'accident qui changera tout. De nombreux allers-retours entre histoire et présent s'opèrent de façon harmonieuse. L'écriture est splendide, on respire Casablanca (la ville d'installation du couple), les rites et coutumes marocaines, les nombreux qu’en-dira-t-on, l'insupportable promiscuité familiale, les gourous et croyances religieuses, l'authenticité de la parole donnée, la folie et le malaise. On pourrait reprocher le parti pris de Tahar Ben Jelloun en tant qu'élément de la composante masculine et on n'en fera rien car il a pensé à tout ! Et oui, on admire le travail d'orfèvre de cet auteur qui manipule les mots avec une dextérité remarquable (jamais de lourdeurs, un grand sens de l'accessibilité de langage à tous, point de nombrilisme de sa part, une profonde humilité et une grande empathie, respectant ses personnages, les laissant maîtres de leur destin et justifier leurs actes, ne cherchant pas à tirer la couverture à soi, esthète des lexiques français et arabe). Remarquable analyste des rapports humains, de la condition féminine au Maghreb, de la difficulté d'aimer sans communiquer au sein d'un couple, Tahar Ben Jelloun démontre l'instabilité opérante lorsque l'un des membres est nié dans son entité, dans son intégrité. Du grand art (le sixième selon Étienne Souriau).

Livre reçu et lu dans le cadre de l'opération On vous lit tout (presque tout) organisée par Libfly, Le furet du Nord et les éditeurs (ici Gallimard) : un grand merci !

sortie prévue le 22 août 2012 

avis de Une Comète


évasion musicale : The sound of silence - Simon & Garfunkel

14 commentaires:

  1. Ton billet est magnifique. Mon approche est un peu différente mais j'ai beaucoup aimé aussi :)
    Je t'embrasse :))

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Nos deux billets se complètent bien. Je t'embrasse fort.

      Supprimer
  2. Ça fait longtemps que je n'ai pas lu un livre de cet auteur, je note :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est le premier livre que je lis de Tahar Ben Jelloun... sûrement pas le dernier. Bises

      Supprimer
  3. Voici un commentaire qui donne envie de le lire, je le note dans ma LAL (en tout début)
    Comète également l'a bien apprécié. Je mets un com.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Une Comète va l'envoyer à Fransoaz : on peut tout à fait continuer le chemin vers toi ou d'autres copines blogueuses.

      Supprimer
  4. Je viens de dresser mon planning de lecture pour septembre/octobre.
    Ce livre en tout cas est très tentant.

    RépondreSupprimer
  5. Tiens, je l'ai vu sur un autre blog cet après-midi et la blogueuse en parlait différemment mai elle avait bien aimé aussi. Ah, ben tiens, c'était sur le blog de Une Comète ;-)
    Bonne semaine.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, comme c'est bizarre ? bises et bonne semaine, ma Cath.

      Supprimer
  6. Il a fait de très beaux portraits de femmes, et il a une douceur, et une sensibilité, et une force admirables. Je l'aime beaucoup.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je sens que je vais bien aimer cet auteur à la sensibilité féminine bien développée.

      Supprimer
  7. Il a l'air magnifique, et en plus, j'aime beaucoup cet auteur.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Toi aussi, comme Anis ! Bon, je me laisse guider, alors ?

      Supprimer