Le poids des secrets #3 (Tsubame) #4 (Wasurenagusa) # 5 (Hotaru) - Aki Shimazaki

Suite à ma lecture récente du tome 2 Hamaguri, j'ai achevé cet été la série Le Poids des Secrets d'Aki Shimazaki. Bien m'en a pris !

Avant de parler succinctement des trois derniers tomes, je vous propose un petit point-repère, histoire qu'on ne se perde pas trop, parce que dans le genre sac de nœuds, la série nous présente en cinq tomes très courts, cinq personnages liés et sujets à des secrets de famille bien lourds. Chacun.e est en quête de sa propre identité/son passé.

Tsubaki (#1) revient sur le passé de Yukiko, fille de monsieur Horibe.
H
amaguri (#2) met en lumière Yukio, compagnon d'enfance de Yukiko, fils naturel de Mariko Kanazawa et adopté par le chimiste Kenji Takahashi.
Tsu
bame (#3) relate l'enfance et la vie de femme de Mariko Kamazuka, née coréenne, élevée au Japon après l'installation dans ce pays de sa mère et de son oncle, dissidents coréens.
Wasurennagusa (#4) décortique le passé de Kenji Takahashi.
Hotaru (#5) revient sur le secret porté par Mariko toute sa vie.

Tsubame se détache par son côté histoire dans l'Histoire : ce tome est centré bien sûr sur son héroïne principale (Mariko), sur la façon dont elle s'est construite après l'abandon maternel. Mais il aborde aussi davantage le conflit Corée-Japon, la condition des expatriés, la survie après le tremblement de terre en 1923. Dans ce recueil, une vraie poésie et une lenteur se détachent. Aki Shimazaki prend le temps d'installer les ambiances, les paysages, la symbiose entre l'élément nature et l'être humain, pèse les mots pour éviter des quiproquos. Il y a une douceur et un art certain de contemplation.


Wasurenagusa met en lumière l'âme masculine la plus noble de la série : Kenji Takahashi, assurément un magnifique personnage fictionnel avec une grandeur d'âme (un pendant contemporain de l'austenien Fitzwilliam Darcy). La figure paternelle s'entend dans Le poids des secrets surtout par l'éducation, plus que par l'hérédité même si la quête de l'identité qui construit chaque être humain est essentielle pour combler les failles. Wasurenagusa narre le cheminement d'un fils à papa-maman qui s'affranchit par amour.


Hotaru finalise la boucle entamée par Tsubaki. Ce tome revient sur l'avènement de Mariko en tant que femme, et notamment sur certaines anecdotes de sa vie conjugale. Dans cet épisode, on ressent la campagne du Japon, l'impact des bombes de Hiroshima et de Nagasaki sur la population, l'art de l'honneur, l'exploitation et le rejet de populations immigrées.

 

 

La série Le Poids des secrets revient continuellement sur les dualités fertilité/stérilité, filiation/abandon de lignée, famille de souche/famille d'adoption. C'est même étonnant à quel point les pères naturels assument si mal leur paternité, qui est reflétée soit par le biais de l'adoption, de personnages masculins intermédiaires (figures paternelles de substitution, des voisins, des collègues de jeux de société). Aki Shimazaki avec sensibilité évoque la Grande Histoire qui impacte nécessairement les destins singuliers, la culture japonaise faite de rites et de castes, mais aussi terreau à un melting-pot régulier d'immigration. Les personnages sont dressés avec beaucoup de classe ; même le plus ragoûtant d'entre eux est rabaissé uniquement par sa faiblesse. Le couple Mariko et Kenji Takahashi éblouit par son romantisme et sa sagesse. Tout est délicat : l'écriture, la narration, les descriptions, la façon d'esquisser les personnages.

Les titres des tomes sont choisis avec élégance, à l'image des contenus : Tsubaki pour camélia mais aussi prénom d'une petite-fille de Mariko et de Kenji ; Hamaguri pour la palourde japonaise qui sert ici de messager ; Tsubame pour l'hirondelle qui ne fait pas le printemps mais dont le retour d'un couple présage de jours heureux ou d'apaisement, Tsubame est aussi le nom donné à un personnage important de la série ; Wasurenagusa  pour le myosotis, une fleur de rêve et de félicité espérée ; Hotaru pour la luciole qui peut se révéler un vrai guet-apens pour jeune fille en fleur). Le glossaire linguistique en fin de chaque manuel est nécessaire (car des mots japonais épars naviguent dans la prose d'Aki Shimazaki) et participent à l'évasion et à la poésie du tout.

En résumé : Le poids des secrets est une série de cinq romans courts (pas plus de cent trente pages chacun) sympa à lire et à découvrir qui met en lumière des pans de l'histoire et de la culture japonaises, avec des personnages nobles, dignes et élégants. J'ai bien aimé.Ce fut une brève et belle pause estivale.

Collection Babel. 

Empruntés à la bibliothèque

De la même autrice :

 

et un de plus pour le challenge Les trilogies ou les séries de l'été de Philippe Dester et pour le challenge Animaux du monde de Sharon (pour les tomes Tsubame et Hotaru).

trilogie de l'été


18 commentaires:

  1. J’en ai lu il y a très longtemps chroniqué à mes débuts bloguesques... j’avoue n’en avoir gardé aucun souvenir :( c’est dommage vu ton billet ... bisous

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    1. C'est une série sympa et je pense que je fais surtout retenir le couple Takahashi.

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  2. Reste le souvenir d'avoir beaucoup aimé!!!

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    1. Moi qui ne suis pas fan de séries (à part quelques exceptions comme celle des HP), j'avoue que Le poids de secrets répond à mes besoins : récits courts (moins de 150 pages chacun), informations sur l'histoire et la culture d'un pays (le Japon) qui ne m'est pas encore familier, moment sympa de lecture sans prétention et avec beaucoup de délicatesse et de simplicité.

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  3. Comme Keisha, un beau souvenir de lecture (et je continue avec la série suivante, que je lis petit à petit) et une addiction totale pour les magnifiques couvertures !

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    1. Oui les couv' sont très belles et délicates comme leur contenu !

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  4. Je me rends compte en lisant tes billets que j'ai pas mal oublié ! je me souviens par contre que le dernier tome m'a paru assez différent des autres, mais éclaire bien tout ce qui a précédé.

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    1. Tu as raison, il est différent des autres tomes car il parle d'abord du quotidien de Tsubaki la petite-fille avant de décrocher et de narrer le secret de la grand-mere. Les autres tomes éclairent surtout leur personnage principal.

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  5. J'avais beaucoup aimé cette série qui m'avait enchantée, malgré le sujet difficile.

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    1. L'autrice fait du très bon boulot sur la mémoire collective et l'Histoire. C'est fait avec une très grande délicatesse et beaucoup d'équilibre. Je suis vraiment ravie d'avoir lu et fini cette série cet été

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  6. Dis donc, il faut se lever tôt pour prononcer le nom de l'auteur et les titres ! Aussitôt lus, aussitôt oubliés !
    Merci pour ta participation à mon challenge.
    Voilà une série terminée.
    Bon dimanche.

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    1. Je trouve que le nom de l'autrice est plutôt facile à prononcer. Après le titre du tome 4 est celui qui nécessite le plus d'efforts à dire.

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  7. Je n'ai lu que le premier, pas vraiment emballée, j'ai laissé la série de côté. J'ai dû passer au travers de quelque chose ... ça m'arrive souvent avec la littérature japonaise, hélas !

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    1. Bizarrement, il ne faut pas laisser trop de temps entre les tomes pour laisser imprégner l'ambiance et aussi pour reconstituer tout le prisme familial sans oubli ni erreur (je regrette d'avoir laisse tout ce délai de lecture entre les rôles 1 et 2). C'est une série vraiment intéressante. Après, je sais qu'il y a d'autres oeuvres à découvrir.

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  8. J'ai beaucoup aimé cette série.
    J'ai entamé une deuxième mais je l'ai laissée en plan pendant le confinement (bibliothèque fermée). Il faut que je la reprenne (mais comme tu le dis dans ton dernier commentaire, c'est mieux de tout lire d'un coup).
    Bises :-)

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  9. J'avais tellement aimé cette série ! Une merveille !

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