Heureusement que les copines sont là pour vous motiver à répondre à un challenge (accessoirement, le vôtre !) Je parle bien sûr de Minou et Au secours, ma PAL déborde coorganisé avec Malika (enfin, c'est Malika qui a eu l'idée). Je vous présente donc ma première descente de PAL (non, ce n'est pas le nom d'une nouvelle bière du ch'Nord) Ce que le jour doit à la nuit de Yasmina Khadra.
Younes, magnifique Algérien aux yeux azur (du genre Zidane sans coup de boule, ce dont il serait bien incapable (que bien lui en prenne ! - réflexion toute perso, hors de propos)) a tout pour lui : la beauté (déjà suggérée), l'intelligence de la réflexion, le savoir, l'art de s'intégrer à tout et à tous, de lier les différentes communautés sans crainte d'en trahir une, un personnage lisse et c'est bien là, le problème.
Un incendie de champs de blés conduit à la ruine familiale, au déshonneur, au retour à Oran côté bidonvilles. Younes, fragilisé, découvre la pauvreté, un pendant de cette Algérie coloniale multiple et complexe, où le pouvoir reste essentiellement détenu par la communauté française depuis quatre générations, où la répartition des richesses demeure inexistante, poussant à la révolte les plus fragiles, les illettrés candidats au rang de fellagas. La guerre d'indépendance frémit. Mais Younes possède un degré de chance assez exceptionnelle : son riche oncle pharmacien semble tout disposé à le prendre sous son aile, avec l'abjecte condition d'oublier à jamais sa mère, son père et sa petite sœur.
Ce que le jour doit à la nuit, un roman riche en histoires (la grande et la petite, surtout la grande), décrit cette Algérie si méconnue, cette assemblage de communautés au bord de l'implosion puis le conflit civil. On comprend à travers ce récit, la difficulté de reconstruction de ce beau pays après le départ des « Français », après une colonisation plus aliénante que le protectorat subi en Tunisie et au Maroc. La population, globalement moins lettrée (l'asservissement nécessite l'inculture), ne fut prête à conduire le pouvoir, par manque de formation tout simplement, les instructeurs étant priés de dégager vite ! Oui, ce livre rappelle le drame algérien et les raisons qui conduisent aujourd'hui encore nos deux communautés à cette difficulté de communication. Ce fut un réel déchirement : de quitter sa patrie (des Pieds-Noirs natifs de la terre algérienne depuis deux, trois voire quatre générations - certains spoliateurs et esclavagistes, beaucoup en exil contraint - ne connaissaient que la France des cartes postales) ce que Jacques Derrida a parfaitement exprimé en nostalgérie ; de pousser une population à un état général de schizophrénie ambiante (le combat entre voisins ou pairs, le conflit armé et idéologique entre harkis et fellagas etc) ; de ressentir impuissants la lâcheté et l'abandon des dignitaires français (en particulier le Général de Gaulle, qui n'a visiblement rien compris). On respire l'ambiance d'Oran et on n'a qu'une envie : la vivre en direct ! Ce versant historique, parfaitement développé grâce aux anecdotes vécues par le personnage principal, instruit le lecteur et donne du corps au récit.
La « petite histoire », considérée comme fresque, me pose un problème : le côté atone du héros (plutôt non-héros, d'ailleurs), sorte de Zadig des temps modernes sans grande conviction, partagé entre les deux cultures, en manque affectif évident (son enfance atrophiée l'explique) m'a bien chauffée (en ces temps de gel, c'est idéal mais certainement pas prévu par Yasmina Khadra) tout comme la relation d'une mièvrerie incommensurable avec l'amour de sa vie. Là, très clairement, Yasmina Khadra frôle le Harlequin et entache le volet politique passionnant de son intrigue. Des bluettes à n'en plus finir, des amitiés longue durée qui volent en éclat pour une relation platonique : on croit rêver et surtout on pleure de voir un si bel ensemble gâché. Younes subit sa vie et son changement de prénom avec passivité, fait ce qu'on lui demande sans broncher, n'exprime aucune initiative sauf en toute fin, mais sans harceler : incroyable ! Yasmina Khadra souhaitait certainement écrire une œuvre relatant la guerre franco-algérienne vue de l'intérieur, Younes devenant un substitut narratif secondaire. L'auteur a tenté le côté clair-obscur, ce contraste entre la marche accélérée de l'Histoire et l'attentisme de son non-héros mais son exploitation m'a semblé mal engagée et assez édifiante, au point d'avoir envie de secouer le cocotier et de me dire que l'intrigue ne méritait pas ce témoin-là : un comble !
Éditions Pocket
Livre lu en LC avec Minou (merci, merci, merci, ainsi qu'à Malika !)
avis : Minou
et un de plus pour les challenges Au secours, ma PAL déborde (fin le 30 janvier, challenge donc réussi) de Malika et de moi (sur une idée de Livraddict), de Denis et Fabienne, de Sharon et de Laure (prix France Télévisions 2008, prix Lire meilleur livre de l'année 2008, etc)
Éditions Pocket
Livre lu en LC avec Minou (merci, merci, merci, ainsi qu'à Malika !)
avis : Minou
et un de plus pour les challenges Au secours, ma PAL déborde (fin le 30 janvier, challenge donc réussi) de Malika et de moi (sur une idée de Livraddict), de Denis et Fabienne, de Sharon et de Laure (prix France Télévisions 2008, prix Lire meilleur livre de l'année 2008, etc)
C'est un auteur que je n'ai toujours pas envie de lire ...
RépondreSupprimerL'attentat est une une œuvre remarquable que je te conseille. Ce que le jour doit à la nuit mérite d'être lu pour son côté politique pédagogiquement bien écrit. Bises
SupprimerEn fait, je devrais effacer mon avis et me contenter d'un "Voir chez Philisinne Cave" dans mon article (comment ça, c'est de la triche ? ^^) tant le tien est bien écrit et correspond aussi à mes impressions. J'ajouterais juste (j'ai oublié de le dire chez moi, mais ça transparaît sans doute dans le peu de place que j'y ai accordé dans mon article, contrairement à toi qui en parle vraiment bien) que la petite histoire prenait trop le pas sur la grande, sans doute à cause de l'inertie de Younes qui refuse de voir ce qui l'entoure, hors lui-même et Emilie.
RépondreSupprimerTu rigoles ou quoi ? Ton article est magnifique et d'une prose remarquable. Nos présentations de ce livre se complètent, je trouve, et tu présentes mieux les personnages et leurs réactions que je ne l'ai fait. Bises
SupprimerJe vois très bien ce qe tu veux dire et pourtant non seulement ça ne m'a pas gênée mais surtout j'ai adoré.
RépondreSupprimerCe héros et ce côté très romanesque de la petite histoire donne un côté nostalgique et mélancolique qui m'a emportée ...un peu à la manère des films d'Arcady.
Le côté nostalgique et mélancolique m'a plu également mais la mièvrerie en lieu et place du romantisme m'est insupportable ! Bises
SupprimerC'est très intéressant effectivement de lire vos deux avis qui se rejoignent mais différents et complémentaires ;) très bon article c'est certain ;) bon dimanche
RépondreSupprimerOui, cette LC fonctionne parfaitement sur ce titre car nos deux visions éclairent l’œuvre différemment. Merci, Laure, pour ton passage et tes gentils mots. Bises et bon dimanche.
SupprimerUn roman très connu mais je n'ai encore rien lu de cet auteur.
RépondreSupprimerPasse un bon dimanche.
J'espère que ton dimanche fut agréable : sache que le titre à un mot pour ton challenge me pose problème !!!!!! (j'enrage comme l'héroïne d'ailleurs)
SupprimerMerci pour ta participation !
RépondreSupprimerJe vais lire bientôt un roman policier de Yasmina Khadra.
Je surveillerai donc ton avis. Je suis curieuse de découvrir Khadra en auteur de polars : je l'imagine très bien en fait.
SupprimerToujours pas lu cet auteur. Il va pourtant falloir que je m'y mette un jour^^
RépondreSupprimerCommence par L'attentat, très fort !
SupprimerJ'ai adoré ce livre !! Et la relation amoureuse ne m'a pas dérangée, je ne me souviens même pas que c'était à l'eau de rose... C'était un livre magnifique sur le déchirement intérieur (du héros et de l'Algérie)...
RépondreSupprimerOui, j'ai failli mettre ne évasion musicale Les yeux noirs d'Indochine, c'est dire... Un peu translucide le déchirement intérieur politique du héros, je trouve (ou alors trop subtil pour moi, c'est fort possible).
SupprimerPas encore lu ce livre. Par contre, sans m'en rendre compte,je m'attaque à ma PAL !!! Mais, et oui, il y a un mais, lorsque je vais reporter les livres à la bibliothèque, je ne sais pas pourquoi, je repars avec plus de livres que je n'en ai rapporté !! c'est sans espoir : ma PAL restera importante !
RépondreSupprimertu es absolument délicieuse, je t'adore ! bises (il va falloir te créer un défi tout perosnnel : Au secours ma PAL dBorde ! (traduction : ma PAL de B(ibiliothèque)orde)
SupprimerJ'en ai lu énormément de lui, plusieurs à la suite, il a beaucoup écrit sur le terrorisme islamiste mais à la fin je crois que je n'en pouvais plus de cette ambiance et de ces femmes toujours bâillonnées. Je suis arrivée à l’écœurement complet de son style, ce qui est parfaitement injuste. Le relirai-je un jour ? Certainement...
RépondreSupprimerC'est vrai que les femmes restent dépendantes de l'avis de leurs maris mais l'image de la tante pharmacienne est intéressante : elle assure le quotidien quand son mari ne peut plus.
SupprimerCurieux bonhomme que ce Yasmina Khadra. Avec un prénom féminin il fut un certain temps le patron des services spéciaux algériens et aujourd'hui un immense écrivain algérien de langue française. J'ai vécu en Algérie pendant 5 ans, j'ai compris que ce pays est l'un des plus complexes d'Afrique du nord...
RépondreSupprimerJeanmi, vous connaissez des pans de la vie de Yasmina inconnus de moi : merci ! Pour le prénom féminin, c'était un choix de sa part, une forme de contestation publique : j'aime assez l'idée (mon côté contrariant, assurément). Oui, je comprends ce que vous dites de l'Algérie, cette complexité me semble bien décrite dans ce livre : des communautés qui vivent ensemble mais sans communiquer et surtout en ne partager pas les mêmes lieux d'hébergement (être sans la même terre mais sans y être)
SupprimerUn roman que j'avais beaucoup aimé, j'avais trouvé les personnages très forts.
RépondreSupprimerLe groupe de garçons me paraît assez mou : j'ai préféré l'oncle et la tante.
SupprimerCoucou Phili, j'ai lu un ou deux Yasmina Khadra, je n'accroche pas trop à son style "flamboyant"... Bisous :)
RépondreSupprimerPas de flamboyance à part les Yeux noirs : quand j'y pense, j'en souris encore. je te jure que je suis à deux doigts de rajouter mon évasion musicale.
SupprimerC'est bizarre ce que tu dis sur le côté Bisounours-Harlequin car je ne me suis jamais décidée à l'acheter ou à l'emprunter, malgré les billets élogieux lus ici et là, c'est ce côté là que je percevais qui a dû me freiner !! ;)
RépondreSupprimerPlutôt Harlequin que Bisounours du style "je t'aime mais ce n'est pas possible" (non, le héros n'est même pas capable de le dire). Bises
SupprimerAprès avoir lu de nombreux billets sur ce livre (à l'époque de "Découverte d'un auteur chez Pimprenelle"), je n'avais pas retenu ce côté harlequinade. Ca aide peut-être dans la lecture ? Ca rend l'histoire moins tragique ?!
RépondreSupprimerJ'ai lu "L'attentat". Dans ce livre, la femme s'exprime tragiquement.
Biz
C'est vrai, vu comme cela, on peut considérer l'historie d'amour ratée comme un passe-temps, un côté léger dans le sombre. Mais c'est son traitement qui m'a semblé lourd ! J'ai aimé L'attentat car là, il ne s'est pas permis de faire du mélo (ce qui aurait été mal venu, je trouve)
SupprimerJ'aime beaucoup ton billet et tes arguments. Je n'ai pas lu cet auteur - ces romans ne m'attirent pas... je ne sais pas expliquer pourquoi?! Mais là justement, la façon dont tu en parles m'intrigue... et même pas peur du côté arlequinade!!
RépondreSupprimerJe crois que tu aimeras l'ambiance dégagée par ce roman. Bises et bonne découverte.
SupprimerBonsoir !
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé ce roman tout comme "L'Attentat" et "L'Equation africaine". Je suis sensible à son écriture, à sa manière de voir le monde. Belle chronique et amusante en plus ! :D
Bonsoir Heide et bienvenue ! (j'ai profité de ton message pour aller fureter sur ton blog : qu'est-ce que c'est joli, chez toi ! Je suis trop contente de ma découverte). J'ai vraiment aimé L'attentat. Peut-être que j'attendais le même registre et ce n'est pas ce qui s'est passé. Merci en tout cas pour ton gentil mot.
SupprimerMerci du compliment ! :D
SupprimerJe m'inscris à ta newsletter pour suivre tes articles : moi aussi je suis contente de ma découverte ! Depuis le temps que je vois ton pseudo ici ou là, j'aurais dû venir plus tôt. Belle journée !
C'est l'intérêt des challenges (enfin, pour moi) : découvrir l'univers d'autres participants(tes). En ce moment je manque de temps mais ton adresse est enregistrée !
SupprimerBonjour ,Philisine Cave ...j'ai écrit une fiction centrée sur le drame des harkis ... et qui suit son chemin.Comment la soumlettre à ton regard ? (La forfaiture du corbeau, Editions Bénévent, 2012 )
RépondreSupprimerBonjour Hacène. J'ai connu une déconvenue avec un auteur dont la première œuvre était éditée à compte d'auteur : je n'ai pas trop apprécié l'expéreince et suis plus méfiante depuis, à ce genre d'exercice. Si vous tenez vraiment à "mon regard", contactez-moi par l'adresse jemelivre@gmail.com, nous aurons l'occasion d'en discuter. Voilà et bonne soirée.
Supprimerj'ai lu et adoré ce livre !!!! pas de billet par contre..
RépondreSupprimerflûte alors !
SupprimerJ'ai lu ce livre, et passé un super moment...
RépondreSupprimerConcernant l'histoire entre Youness et Émilie, c'est malheureusement ce qui peut se passer également dans la vraie vie...
Petite critique sur le site que je trouve sympas, très même, les feuilles d'automne en fond d'écran, c'est juste horrible pour la lecture :-) :-) :-)
Oui, les ratages amoureux arrivent souvent : c'est la pesanteur du propos que je juge indigeste.
SupprimerQuant aux feuilles d'automne, sachez, cher(chère) anonyme, que mon A. partage votre point de vue. De nature fidèle, je ne souhaite pas m'en séparer de sitôt (je parle des feuilles... de mon A. aussi) mais réfléchis à une petite modification dans le futur (pour vos beaux yeux ... et accessoirement ceux des autres).