Nymphéas noirs - Michel Bussi *****

Voilà un livre offert de multiples fois sans l'avoir lu, avec le retour enthousiaste de mes proches gâtés et ravis du cadeau. Après un désert littéraire lié à des déconvenues successives, je me suis dit qu'il n'y avait pas de raison que je me prive d'un tel joyau, qu'après tout, moi aussi, je méritais une lecture simple, efficace, pas prise de tête, un bon gros polar frenchy, un succès qui collectionne les prix... 

Mais que n'avais-je pas imaginé ? Parce que sous son allure "d'enquête un peu barrée avec une vieille sorcière, une petite artiste en herbe, une instit' qui met le feu avec ses yeux", j'avais osé supputer un fait divers simplet, une histoire rectiligne, qui ne demande à aucun de mes neurones de fonctionner (surtout en vacances). J'ai même pensé un temps, perfide : "eh, eh, ce personnage ne sert à rien" ou bien "cette scène n'est pas possible dans la vraie vie parce qu'on ne peut pas pas consulter les dossiers comme cela, surtout maintenant. Monsieur Bussi, vous vous plantez !" (oui, oui, je peux vraiment être mesquine) avant que la connection cérébrale (plutôt longue, en ce moment) perturbe mes railleries et me plonge dans un total désarroi : "non, Phili, c'est toi, Cocotte, qui commence à comprendre... Seulement, cinquante pages avant la fin !"  Oui, ce n'est pas glorieux !
Bref, j'ai eu tort sur toute la ligne (comme cela m'arrive rarement : si, si je vous assure !) et j'en suis ravie (comme mes potes).
Un ophtalmologue pas du genre fidèle est retrouvé mort à Giverny, village par excellence du peintre Claude Monet, dont il était un fervent passionné. L'enquête piétine et se scinde rapidement en trois parties : les rendez-vous galants, les enfants et la peinture (les chers Nymphéas). Tout y est mais dans des espaces-temps parallèles au cours desquels le chien Neptune et des rubans d'argent servent de passerelles.

Sans trop en dire, et là clairement on peut me taxer de taiseuse, Nymphéas noirs est un policier grandiose. Si, si, j'emploie rarement cet adjectif mais là, il est totalement mérité et justifié. Je pense même, qu'à l'instar de Pierre Lemaitre, Michel Bussi possède une écriture et une ingéniosité qui le mèneront au prix Goncourt un jour (ce roman frise l'intelligence tout du long). Il y a un souffle épique dans ce texte, une référence aux mythes, une poésie dans la prose, la capacité à rompre continument mais sans fracture. Il y a une façon d'émouvoir sur cette "réparation"Nymphéas noirs représente un lent mais juste cheminement d'une femme vers la liberté et le bonheur amoureux, aidée en cela par une vieille camarade qui a apprécié et remercié son honnêteté. 
L'art dans tous ses états 
Tout est beau dans cette œuvre de Michel Bussi : les mots, les sous-entendus, les détails jamais laissés au hasard (tout compte : MB est un écrivain de l'essentiel), l'histoire emberlificotée (liée à une construction du récit maîtrisée), la violence contenue sans excès de descriptions morbides. Tout y est jusqu'aux noms. Tout simplement remarquable !     

Éditions Pocket
A tous prix 
autres avis :  Valentyne, Aifelle, Alex, Galinette, Philippe Dester,

et un de plus pour les défis de Shel (parce que la peinture en devient une héroïne et que ses artisans historiques y prennent toute la place) et d'Aspho (prix des lecteurs du festival Polar de Cognac, 2011)

15 commentaires:

  1. Je suis moins enthousiaste que toi, je n'en garde pas un grand souvenir. D'ailleurs, je n'ai pas eu envie de relire l'auteur.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pour moi, Nymphéas noirs est un texte d'une grande intelligence, d'une belle qualité littéraire, très bien construit et vraiment émouvant. Il exploite plusieurs registres (romanesque, épique, mystique) et use de deux procédés qui rendent la lecture fluide et alerte (le témoignage et le récit), j'exclus l'introduction qui relève de la mythologie. C'est vrai, ingénieux, remarquable. Je m'emballe rarement, mais là je sais que c'est un coup de cœur assuré.

      Supprimer
  2. Quel enthousiasme ! Ma femme a lu tous les romans de ce monsieur, je n'ai donc qu'à tendre le bras pour me saisir de celui-là ;)

    RépondreSupprimer
  3. Tu ne taris pas d'éloges !! Jamais lu Bussi en ce qui me concerne mais je pourrais bien changer d'avis ;-)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, je te le conseille. C'est vraiment une réussite. Le risque ensuite pour l'auteur est de rester dans cette façon de procéder. C'est là qu'il doit continuer à casser les habitudes pour progresser.

      Supprimer
  4. Je n'ai jamais lu cet auteur. J'avoue qu'il ne m'attire pas spécialement...

    RépondreSupprimer
  5. J'ai découvert Bussi avec ce titre. J'ai vraiment adoré : un gros coup de coeur pour moi ! Du coup, les autres romans lus me semblent forcément moins bon. Je n'ai pas encore tout lu, ça viendra.
    Bonne fin d'année.

    RépondreSupprimer
  6. L'or rouge :
    Joyeuses fêtes de fin d'année Philisine, gros bisous à toi
    http://lorouge.wordpress.com

    RépondreSupprimer
  7. j'ai adoré moi aussi. Le seul problème c'est que je suis presque convaincue que c'est et restera le meilleur de l'auteur...

    RépondreSupprimer
  8. De Bussi, je n'ai lu que Maman a tort - dont je n'ai pas gardé un grand souvenir - mais ton enthousiasme débordant m'intrigue. Je lirais peut-être ce livre s'il croise mon chemin. Je profite de ce commentaire pour te souhaiter de belles fêtes de fin d'année. Bises.

    RépondreSupprimer
  9. j'en garde globalement un bon souvenir aussi! Bon passage à 2017!

    RépondreSupprimer
  10. On dit souvent que c'est son meilleur. J'ai commencé Un avion sans elle, et franchement, j'ai du mal avec son écriture qui ne me semble pas avoir évoluée beaucoup depuis ses premiers romans. Mais je lirai peut-être celui-ci un jour.

    RépondreSupprimer
  11. Il parait que c'est son meilleur, j'essaierai. Ceux que j'ai lus ne m'ont pas convaincue jusqu'à présent ;)

    RépondreSupprimer