Les livres à l'épreuve du temps #1 : Leurs enfants après eux *****- Nicolas Mathieu

J'inaugure pour cette session une nouvelle rubrique : celle de courts (voire très courts) avis de lectures plus ou moins récentes, parce que c'est cela ou rien du tout sur Jemelivre (et au regard de l'intitulé du blog, c'est quand même un peu dommage qu'il y ait si peu de chroniques littéraires).
Le protocole est toujours le même : chaque livre a été lu en entier (sinon, je le précise mais n'évalue pas mon ressenti). En ce début de vacances, je suis motivée : profitons-en !

Je commence par un best-seller, prix Goncourt 2018 que j'ai beaucoup aimé.
Leurs enfants après eux relate le parcours de vie de plusieurs jeunes (Anthony, Stéphanie, Hacine, Vanessa, Clem et d'autres) et d'un couple parental (Hélène et Patrick), d'une ville industrielle en déclin (Heillange) dans l'Est de la France et de ses habitants si dépendants de l'activité économique. 

Leurs enfants après eux parle des années 1990, de six années introduites par des paroles de hits reconnaissables de l'époque : on y voit l'espoir, le chômage, le désir, les occasions manquées, les petites arnaques ou méfaits pour s'en sortir, les prêts immobiliers qui ont ruiné des propriétaires de pavillons, le divorce et aussi la mort et le deuil. 
On y redécouvre l'humilité respectable des ouvriers dont certains n'ont pas toujours les codes de leurs honnêtes revendications, on côtoie des adolescents en quête d'amour et d'expériences, de fêtes alcoolisées. 
On arpente une cellule familiale en mal de communication, dont le rêve de posséder prend le pas sur l'être parce qu'on lui a vendu du rêve qui s'achète mais qui n'apporte que peu de satisfaction.

Dans Leurs enfants après eux, on voit le tissu social se déliter, les notables arguer d'ouvertures culturelles ou de centres aquatiques pour la bonne conscience (à défaut de cause). On y retrouve une jeunesse fière et désireuse de s'en sortir, matraquée par un déterminisme social qui ampute l'avenir des plus fragiles et construit celui des plus riches.

Dans Leurs enfants malgré eux, Nicolas Mathieu rend hommage à toutes ces régions industrielles décimées par le départ des actionnaires, à ce peuple besogneux et si méritant qui n'aspire qu'à vivre honnêtement de son travail, qu'à s'offrir de menus plaisirs, qui trime à élever sa progéniture quand le discours émis est contredit par une réalité qui bafoue et humilie. 

Nicolas Mathieu a écrit un livre essentiel, à la fois sociologique et littéraire, avec une écriture accessible, sincère et merveilleusement accrocheuse, sans fausse pudeur. 
Tout, absolument tout, est réussi : l'identité des personnages, la description de la région, la chronologie de l'époque, des scènes mémorables (un scooter qui va créer un tsunami, la fin d'une sobriété à l'issue d'un pétage de plomb, les nombreux "ratés" d'Anthony et de Stéphanie, les scènes d'amour physique nombreuses mais pas racoleuses).   

Il y a un avant Leurs enfants après eux, ... et un après ! REMARQUABLE. 

Éditions Actes Sud


(heureusement que cet avis devait être court !)

5 commentaires:

  1. Très court avis (je plaisante !) pour un très bon roman !

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  2. Pour un avis court, il est bien fourni et très bon. Oui, je devrais le lire, non je ne l'ai pas encore fait

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    1. Tu veux que je t'envoie mon exemplaire ? Bises j'ai toujours ton adresse normalement.

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  3. il est peut être court mais il suffit amplement !

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  4. Tant mieux ! Il est à mon programme 2020 pour une LC :)

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