Bon, comme d'hab, dès qu'il s'agit
d'un coup de cœur littéraire, les mots se barrent vite fait, histoire de ne pas être inscrits ici, parce qu'ils savent bien que rien, absolument
rien ne pourra retranscrire le ressenti, l'éblouissement, la complétude
de Le principe. Ici, aucune incertitude de ma part : ce court roman est un chef d’œuvre !
Jérôme Ferrari profite de cet écrit pour retracer la carrière, des instantanés de la vie du physicien-mathématicien allemand Warner Heisenberg. Érigé entre quatre parties (positions, vitesse, énergie et temps : quatre quantités continuellement mesurées, scrutées en physique quantique, en physique tout court), ce roman se lit d'une traite. Je rassure de suite les « j'aime pas les maths » et les « j'ai jamais rien compris à la physique » : pas besoin d'être un as dans ces domaines pour lire et apprécier Le principe ! Jérôme Ferrari ne rentre pas dans les détails scientifiques. Il explique par deux fois le principe d'incertitude : celui compris par le narrateur mal informé (et qui va se planter à un oral par manque de concentration et d'efforts) et celui expliqué par la belle examinatrice (fatiguée et légèrement énervée par tant de médiocrité, surtout lorsque celle-ci est liée à une paresse intellectuelle). Donc, un bon point pour Jérôme : il ne largue personne et rallie tout le monde, et en particulier les littéraires ! Et, pourquoi donc ? Eh bien, il suffit de humer la prose du monsieur.
Je reste épatée par cette corrélation du fond et de la forme : l'ombre de la seconde guerre mondiale qui plane et engloutit la majeure partie de la carrière du scientifique allemand, l'écriture allongée de phrases mélodieuses et vaporeuses qui suggèrent et interprètent ce qui fut ou pas, l'interrogation légitime sur ces scientifiques qui ont travaillé pour les nazis, qui sont restés en Allemagne pour continuer leurs recherches sur des réacteurs nucléaires (futures armes de destruction massive), l'innocence de ces génies intellectuels à ne pas projeter l'utilisation frauduleuse et macabre de leurs inventions, à construire des ilôts de stabilité dans le pays de la Mort concentrationnaire, à pleurer Hiroshima (parce que les Américains ont devancé l'appel en réussissant scientifiquement une bombe atomique) ou ses habitants (parce qu'une démocratie s'abaisse à répondre à un régime totalitaire par un massacre à grande échelle, parce que la Mort a définitivement gagné, parce que la noirceur humaine dépasse les frontières).
Jérôme Ferrari fait parler les ombres donc, exprime l'incertitude dans tous les domaines : scientifique (avec la physique quantique et Heisenberg), humaine (avec la fin de la guerre et la distinction entre les collabos et les résistants, ceux qui sont restés affamés de recherche coûte que coûte, sans état d'âme et les autres -les futurs suicidaires en cas de découverte détournée), financière avec la crise des subprimes en 2008 qui a assuré la banqueroute de grands organismes bancaires (d'ailleurs, il est toujours intéressant de redécouvrir le volte-face des libéraux devant l'État panseur des magouilles boursières : cela me ferait sourire si cela ne coûtait pas un rond à la collectivité, malheureusement ce n'est pas le cas).
Dans Le principe donc, pas de principe, plus de règle tenue : la dictature (politique ou économique) génère un désordre des consciences, bouleverse l'ordre moral établi. Le temps ne se mesure plus, tout va vite. C'est aussi cela, le fil conducteur de ce roman : ce ne sont pas les découvertes scientifiques qui sont dangereuses, c'est que ce que l'Homme en fait qui le devient.
Éditions Actes Sud
Rentrée littéraire 2014
LC avec Comète, Geronimo et Hélène
autres avis : Dominique, Clara, Alex, Papillon, Cuné,
et un de plus pour le non-challenge de Galinette (mon tout premier : yeah !!!!) et pour le défi de Piplo
image captée sur le site Libfly.com |
Je reste épatée par cette corrélation du fond et de la forme : l'ombre de la seconde guerre mondiale qui plane et engloutit la majeure partie de la carrière du scientifique allemand, l'écriture allongée de phrases mélodieuses et vaporeuses qui suggèrent et interprètent ce qui fut ou pas, l'interrogation légitime sur ces scientifiques qui ont travaillé pour les nazis, qui sont restés en Allemagne pour continuer leurs recherches sur des réacteurs nucléaires (futures armes de destruction massive), l'innocence de ces génies intellectuels à ne pas projeter l'utilisation frauduleuse et macabre de leurs inventions, à construire des ilôts de stabilité dans le pays de la Mort concentrationnaire, à pleurer Hiroshima (parce que les Américains ont devancé l'appel en réussissant scientifiquement une bombe atomique) ou ses habitants (parce qu'une démocratie s'abaisse à répondre à un régime totalitaire par un massacre à grande échelle, parce que la Mort a définitivement gagné, parce que la noirceur humaine dépasse les frontières).
Jérôme Ferrari fait parler les ombres donc, exprime l'incertitude dans tous les domaines : scientifique (avec la physique quantique et Heisenberg), humaine (avec la fin de la guerre et la distinction entre les collabos et les résistants, ceux qui sont restés affamés de recherche coûte que coûte, sans état d'âme et les autres -les futurs suicidaires en cas de découverte détournée), financière avec la crise des subprimes en 2008 qui a assuré la banqueroute de grands organismes bancaires (d'ailleurs, il est toujours intéressant de redécouvrir le volte-face des libéraux devant l'État panseur des magouilles boursières : cela me ferait sourire si cela ne coûtait pas un rond à la collectivité, malheureusement ce n'est pas le cas).
Dans Le principe donc, pas de principe, plus de règle tenue : la dictature (politique ou économique) génère un désordre des consciences, bouleverse l'ordre moral établi. Le temps ne se mesure plus, tout va vite. C'est aussi cela, le fil conducteur de ce roman : ce ne sont pas les découvertes scientifiques qui sont dangereuses, c'est que ce que l'Homme en fait qui le devient.
Éditions Actes Sud
Rentrée littéraire 2014
LC avec Comète, Geronimo et Hélène
autres avis : Dominique, Clara, Alex, Papillon, Cuné,
et un de plus pour le non-challenge de Galinette (mon tout premier : yeah !!!!) et pour le défi de Piplo
le thème de me tentait pas plus que cela mais ton enthousiasme va peut-être me faire changer d'avis!
RépondreSupprimerje pense que tu aimeras ce roman. Bises
SupprimerLes maths, la physique : ma tasse de thé (et Ferrari aussi), mais je dois attendre!
RépondreSupprimersinon, je te l'envoie si tu veux !
SupprimerIl est à la bibli, en attente d'être équipé. Et j'ai un mois anglais sur le feu.
SupprimerMais merci!!^_^
avec plaisir et bon mois anglais !
SupprimerLes maths la physique, pas ma tasse de thé et du coup je n'ai -quand même- rien compris !
RépondreSupprimerJ'ai vu cela : c'est dommage, ce rendez-vous manqué !
SupprimerUn roman absolument admirable... Il faut quand même s'accrocher quand on n'est pas scientifique, mais ça vaut le coup. Merci ma Phili pour ce beau billet et cette lecture commune :)
RépondreSupprimermerci à toi de m'avoir suivie ! Grosses bises.
SupprimerUne lecture que j'avais appréciée, même si j'ai préféré "Là où j'ai laissé mon âme" de cet auteur.
RépondreSupprimerJ'ai aussi cet exemplaire grâce à un conseil avisé de Sieur Jérôme : il me tarde de le découvrir. Bisous
SupprimerJ'aurais aimé me ruer sur le livre mais voilà, je n'arrive pas à sauter le pas et j'ai entendu plusieurs fois l'auteur à La Grande Librairie et il ne m'a pas donné envie de le lire, comme si je restais au bord du chemin...
RépondreSupprimerAu fait j'aime pas les maths (même si j'ai eu la mention AB au bac B grâce aux maths), je n'ai jamais rien compris à la physique et encore moins à la chimie...warf !
mais tu sais lire et apprécier les beaux textes, alors....
SupprimerRhaaaa...trop facile comme argument...tssss tu me flattes pour arriver à tes fins...hi hi :D :D
Supprimerje préserve mon lectorat infime !!! Bisous
SupprimerUn roman à lire et à relire, et à faire lire autour de soi. Ravie que tu l'aies aimé !
RépondreSupprimerj'espère qu'il sera diffusé le plus possible, c'est rare de lire de telles splendeurs, je trouve.
SupprimerIl avait tout pour te plaire dès le départ, ce roman.
RépondreSupprimerexact mais avec un risque non négligeable de me décevoir : là, tout fut parfait ! Bisous
SupprimerJe ne suis que joie, tu penses bien ! Il te fallait lire cet auteur, pas possible autrement. Et je persiste : Où j'ai laissé mon âme est son chef d'oeuvre !!!!!
RépondreSupprimerah, j'ai hâte alors !!!! Bon, et Amiens ?
SupprimerAprès avoir lu une comète et ton avis .Il faut que j'écarte mon appréhension de la physique pour découvrir cet auteur
RépondreSupprimerc'est une belle écriture, une œuvre qui questionne son lecteur, le fait réfléchir. Tout ce que j'aime en fait.
SupprimerOui ce sont des interrogations fondamentales en épistémologie. je ne suis pas scientifique, (enfin j'ai étudié des sciences dites humaines), et j'ai toujours regretté mon ignorance en science dites "dures". Toutefois l'histoire des sciences m'a toujours passionnée. Et ce bouquin me plairait beaucoup je pense.
RépondreSupprimeroui, il ne s'adresse pas au public scientifique exclusivement. Et heureusement parce que celui-ci est restreint. Bises
SupprimerJe ne suis pas certaine d'être assez scientifique pour apprécier ce livre mais j'essayerai car j'ai aimé tout ce que j'ai lu de cet auteur jusqu'ici.
RépondreSupprimeril ne faut absolument pas que tu te mésestimes. Cette œuvre s'apprécie pour ce qu'elle est : une biographie romancée.
SupprimerMais quel beau billet ma Phili!!! Je viens de lire celui de Jérôme et je suis archi convaincue, j'aime tout dans ce que tu dis là: Ferrarri qui fait danser les ombres, ce que l'homme fait des découvertes scientifiques, le beau style...
RépondreSupprimerBref, tout me plait, et je suis en joie.
Merci infiniment de votre participation à tous et la tienne en particulier.
je suis vraiment ravie d'avoir lu cette perle et de l'ajouter à ton collier littéraire. Immenses bisous.
SupprimerSuperbe article et un sujet qui me plairait bien.
RépondreSupprimermerci à toi, Denis : je te l'envoie si tu veux ?
Supprimertoi aussi tu as adoré? rohhh mais faut que je le découvre ce Ferrari alors!! Beau billet !
RépondreSupprimermerci à toi, Violette.
SupprimerJe n'ai encore jamais lu cet auteur... A te lire, je me demande clairement pourquoi.
RépondreSupprimerJe crois que tu serais super sensible à sa plume délicate et poétique.
SupprimerTu arriverais presque à me convaincre, et dieu sait que ce n'était pas gagné avec un tel sujet... ! Une chose est sûre, je DOIS découvrir cet auteur !
RépondreSupprimerLe principe m'a plu mais il est possible qu'une autre roman de lui te convienne mieux (de par le thème)
SupprimerQuel billet, je ne peux que le noter!! Merci!
RépondreSupprimerc'est un roman super bien écrit, très complet et instructif. Je l'ai dévoré. Il devrait te plaire.
Supprimer