BD - Cycle Guy Delisle # 1 : Shenzhen ***

J'aime beaucoup l'univers de Guy Delisle, j'aime sa façon ironique de présenter les événements. Avec lui, je ne m'ennuie jamais et j'apprends souvent. Je ne savais pas comment il allait tenir sur le long terme avec Shenzhen (une mission de trois mois passés en Chine) et avec S'enfuir (l'itinéraire d'un otage)  mais franchement, cela le fait, et même très bien ! Trop fort, ce Guy Delisle !

Dans Shenzhen, Guy Delisle narre ces trois mois passés à Shenzhen en Chine dans un studio d'animation. 

Avec humour et sans sarcasme, l'auteur nous narre les difficultés de communication avec la population (notamment par le fait qu'à l'époque de ce séjour, peu de Chinois parlaient l'anglais et lui ne maîtrisait absolument pas le mandarin) mais aussi plus étrangement, ses grosses galères à expliquer les attendus professionnels : les nombreuses utiles relectures de scripts et de planches (notamment celle qui dessine un homme qui se relève de sa chaise ou bien celle des yeux d'une héroïne qui louche) sont hallucinantes.
Ce qui est génial chez Guy Delisle, c'est avant tout son honnêteté, sa profonde humilité, son humanité si imparfaite, sa capacité à nous faire ressentir ce qu'il vit. Il dit son ennui, la monotonie des journées de repas-boulot-dodo, sa solitude d'expatrié, son décompte des jours passés. Un passage à Hong-Kong ou à Canton devient le rêve de l'époque. Et tout cela, on le vit avec et grâce à lui.
Le choc culturel est pesant tout le temps : le discours officiel des radios nationales ; la nourriture exotique pour tout occidental qui se respecte ; Guy Delisle prend le même plat au restaurant parce qu'il est sûr de l'apprécier et surtout de s'assurer de pas déguster un plat indigeste ; la barrière de la langue met une distance continuelle entre lui et les locaux et limite sérieusement les contacts humains. Et, quand il y a contact, rien n'est simple à interpréter : le silence face aux cadeaux, l'interprétation d'un book de photos posé sur son bureau par une ravissante collaboratrice, vue en long, en large et en travers, avec différents décors.
L'ennui donc s'installe et ce n'est pas faute d'initiatives de la part de l'auteur : il narre son abandon de balade à vélo hors de la ville. Même les cours de gym deviennent sa grande distraction qu'il ne raterait pour rien au monde, au point de défier la panne d'électricité ! 

Il est possible que cette histoire souffre d'anachronisme : la Chine y est décrite comme sale (la rue centrale de certains marchés sert de dépotoir, l'absence d'eau peut s'avérer cruelle lors des toilettes publics). L'auteur ne trouve rien à faire à Shenzhen, à part travailler et sortir pour dîner.

Le texte est mesuré et relevé par cette ironie jamais méchante et toujours vive, les dessins sont expressifs et dynamiques, les anecdotes sont croustillantes. L'auteur ne nous épargne rien, arrive à nous distraire avec un rythme de vie spartiate et routinier : et c'est aussi pour cela que je l'apprécie ! 

Édition L'association

Emprunté à la bibliothèque

autres avis : À propos des livres
 
Du même auteur :
Chroniques birmanes
Chroniques de Jérusalem
Pyongyang (lu mais non chroniqué) 

La suite au prochain post avec S'enfuir.


6 commentaires:

  1. Ha Delisle, je crois que j'ai lu tous ses albums!

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  2. pareil, j'ai tout lu même celui publié uniquement au Québec :-)

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    1. Chanceuse ! Et tu oses me narguer avec l'album que je ne trouverai pas en France ? Petite coquine, va !

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