Cycle Valentine Goby : Petit éloge des grandes villes ***

Après la lecture de Des corps en silence puis ma rencontre avec Valentine Goby, il me tardait de me pencher davantage sur l’œuvre d'une auteure contemporaine à la prose atypique, une femme ancrée dans le monde réel, au caractère trempé et si vive. Le challenge Bookineurs en couleurs de Liyah et une petite échappée vont largement contribuer à l'exploration. Une façon toute personnelle d'éclairer et de terminer l'année 2012 en beauté.
Succession de courtes impressions d'une amoureuse des grandes villes en particulier New-York (je la comprends), Petit éloge des grandes villes vaut le détour pour ces descriptions de scènes ordinaires du métro, d'un quartier, d'un flan avalé etc, pour la forme narrative employée par Valentine Goby : un style décomposé, des phrases cinglantes, un rythme haletant épousant parfaitement la vie frénétique dans les mégapoles.
Toutefois, cette auteure importante (à mes yeux) me semble plus à l'aise sur des textes plus longs : elle a besoin de temps pour imposer un lieu (même si le plus souvent, New-York sert de port), construire un univers.
Sur la première partie de l’œuvre, l'exercice de courts récits casse sa dynamique habituelle et quelque part la gêne ou marque un frein à une adhésion parfaite à ses textes. Puis arrivent le second temps et ses Péristories assez proches des pensées intimes de l'auteure : des époques à lieu unique (Marseille, Rome, Londres etc), des microfictions ou bien des récits passionnants sur la façon d'aborder la page blanche, de constituer un dossier déprimant pour la Villa Médicis dans le but de récupérer quelque pécule, d'exprimer la fausse fin d'une histoire d'amour, le silence à Hanoï etc.
Jamais Valentine Goby ne s'écarte de son objectif premier : rendre la ville comme élément principal de ses histoires, en communion parfaite avec ses héros. J'ai trouvé la lecture agréable quoique inégale avec, comme toujours chez cette écrivaine, de vraies splendeurs.

page 120 :
« Les yeux des enfants s'ouvrent en premier sous les lumières et les guirlandes, et c'est tant mieux, ou ma tristesse n'aurait pas de fond. »

page  65 :
« Je suis allongée sur un rocher. Je lisse le creux de mes reins, je déroule ma colonne vertébrale pour épouser la forme de la pierre, ses irrégularités agaçantes, pour les sentir écorcher mon dos. Elles m'empêchent d'être ailleurs dans le rêve, ailleurs qu'ici, sur mon rocher, en plein Manhattan. Je ferme les yeux

pages 131-132 :
« L'asphalte ne contient aucun vide. 
   L'asphalte est étanche, comme les Jardins de Babylone et l'Arche de Noé.
   L'asphalte contredit l'idée d'espace.
   L'asphalte est compacte, ne contient aucun vide.
   Au-cun-vide

et un de plus pour les challenges de Liyah et de La Part Manquante

24 commentaires:

  1. Je ne l'ai encore jamais lue, je commencerai plutôt par un de ses romans.

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    1. Courte rupture de pause pour la réponse :a priori, Banquises semble le plus accessible mais la forme narrative de Des corps en silence vaut vraiment le détour. Et puis L'échappée et finalement cet éloge

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  2. Je l'ai mis sur ma pile pour le relire, mais traîne un peu à le faire, ton avis me donne envie de le faire pour le voir avec un autre regard. C'est le premier de l'auteur que j'avais lu et n'avais pas ressenti certaines choses que tu mets en évidence.

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    1. Grâce à la rencontre avec l'auteure, j'ai retrouvé des passages vécus dans cet écrit (dossier de la Villa Médicis, la page blanche etc). Valentine Goby se caractérise par sa profonde franchise, brut de décoffrage !

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  3. Tu me donnes vraiment envie de découvrir Valentine Goby, pourtant je ne suis pas très intéressée par les auteures françaises contemporaines... mais je ferai une exception !

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    1. Elle vaut son pesant de cacahouètes : je l'aime bien, aussi imparfaite soit elle, aussi innovatrice aussi.

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  4. J'aime bien le principe de ces écrits très courts. Et puis vu le prix du recueil, ce serait dommage de ne pas se laisser tenter^^

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  5. de la supériorité des grandes villes sur les petites... et sur la campagne ! ;p
    J'aime bien Goby.

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    1. C'est marrant que tu en parles car un de ses introductions narre sa très grande oppression face à campagne (alors que sa copine ne rêve que du monde rural): j'ai beaucoup apprécié ce moment.

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  6. Un rythme décomposé ? Je ne suis pas sûre d'accrocher.

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    1. oui, peut-être qu'il vaut mieux que tu passes ton tour pour le moment.

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  7. Je ne garde pas un très grand souvenir des "Corps en silence" ...alors je passe mon tour !

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    1. j'ai vraiment adoré la forme narrative que j'ai trouvé très ingénieuse. Le contenu semble plus austère, peut-être.

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  8. J'aime bien Valentine Goby mais j préfère découvrir les romans que je n'ai pas encore lus... Mais qui sait, ce petit recueil pourrait me servir pour un cours...

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    1. Oui elle réussit parfaitement l'exercice d'intégrer l'élément ville comme personnage principal et ne sort jamais du cadre.

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  9. Coucou ma Louloute ! Je te souhaite d'ors et déjà un bon réveillon :)
    Bisous, gros bisous, gros gros bisous

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    1. Bisous, gros bisous, petite coquine si adorable avec moi : j'espère que la digestion des fêtes s'est parfaitement déroulée ?

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  10. C'est intéressant de prolonger une lecture comme cela en faisant des cycles.

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    1. surtout qu'Une Comète, si généreuse, a bien l'intention que je ne m'arrête pas là ! Bisous

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  11. ça pourrait me plaire par son originalité !

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  12. Mon prochain achat sera sans doute un livre de Valentine Goby, je viens de la croiser chez Kathel et je la retrouve, en double chez toi! J'aime beaucoup son écriture et pense aussi que ses livres se méritent, une auteure qui ne se lit pas à l'improviste.

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    1. La femme est passionnante (vraiment, elle est extra) et j'aime son écriture et ce qu'elle dit : comme Annie Ernaux, elle trace doucement mais sûrement un sillon dans la littérature française contemporaine. Je te remercie de ton soutien. Si tu le souhaites, je peux t'envoyer son Petit éloge et L'échappée. Une Comète m'a offert un très beau cadeau : je vais continuer le cycle !

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