Nos cheveux blanchiront avec nos yeux - Thomas Vinau ****

Je dois cette lecture à Laure qui me l'a offert à l'occasion d'un funeste jour de mon changement de dizaine. Après deux livres lus en avant-première de la rentrée littéraire 2013, j'avais besoin d'une pause, d'un peu d'oxygène... Tiens, comme Walther, le héros !
Partir pour mieux revenir, découvrir pour mieux se trouver. Walther fait le choix de quitter sa dulcinée Sally pour éprouver le manque d'elle, vadrouille entre Norvège, Belgique, Espagne, Gibraltar et France, fait d'insolites rencontres  (un oiseau qui refuse de migrer, une vieille dame qui vit par procuration, un routier exténué) ou aborde des métiers divers (celui de sélectionner les poissons sur un chalutier, par exemple). De ce périple européen, Walther en ressort rassasié : ne précise-t-on pas que les voyages forment la jeunesse ? Et justement, il est temps de passer à l'âge adulte !

Composé en deux parties Le dehors du dedans et Le dedans du dehors, Nos cheveux blanchiront avec nos yeux reste un très beau premier roman et offre au lecteur, outre la beauté du texte (avec une musicalité des mots  remarquable) une jolie leçon de vie. Comme Philippe Delerm, Thomas Vinau s'inscrit comme un écrivain du quotidien, celui des instants fugitifs et de la contemplation, un art qui s'apprend au gré des voyages, qui s'entretient avec l'expérience : aiguiser son regard extérieur, laisser entrer l'infini, lâcher prise sur le reste, apprendre à s'abandonner et à faire confiance, transmettre à son tour. 

page  32
« Il y a toutes ces choses qui nous remplissent.
Tous ces gens croisés, tous ces paysages.
Ils infusent tout doucement en nous comme 
un sachet de thé dans un verre d'eau tiède.»

Walther, personnage en déroute, se déprécie et cette méconnaissance de lui-même gêne ses relations à autrui et ses projets.

page 61
«Il est incroyable de constater l'endurance avec laquelle tu t'occupes de moi, m'écoutes, me supportes et me comprends. La vraie question est de savoir comment tu peux encore t'intéresser à cette imposture que j'incarne, à ce chat peureux qui se fait passer pour un lion. C'est à croire que tu es sourde au vacarme de mes défaites, que ce n'est pas cette musique-là que tu écoutes, ou que tu aimes le bruit déchiré de ma peau lorsque j'enlève les masques. C'est à croire que tu m'aimes bien au-delà de moi.» 

Pourtant, Sally, véritable proue du vaisseau Walther, lui sert d'ancrage à la vie. Ce personnage prend de l'ampleur au fur et à mesure des pélégrinations du héros et de sa stabilité. Sally n'intervient jamais, jolie ombre fixe, plus que présente.
Ce court roman interpelle par ses phrases écorchées où tout est dit en peu de mots : « Les matins qui m'éloignent de toi sont des nuits » (page 66) ou « Ne regarde pas devant. Ne regarde pas derrière. Reste là. » (page 73).

Une œuvre d'une bonne maturité, un premier roman prometteur et annonciateur du si beau Ici ça va (scandé plusieurs fois dans ce texte), une trêve méritée !  

Éditions 10/18
Mille mercis à Laure pour ce cadeau magnifique : énormes bises !


et un de plus pour les challenges d'Anne et de TyJecyka (La Part Manquante)

32 commentaires:

  1. C'est celui que j'ai lu en premier et j'étais emballée. Ici, ça va est arrivé très vite et j'attends le suivant avec gourmandise.

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    1. J'ai préféré Ici ça va et la première partie de Nos cheveux. J'attends en effet le prochain de pied ferme !

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  2. J'ai beaucoup aimé ton article, Philisine. Il faudrait que je me lance un peu dans les premiers romans. Pourquoi pas grâce à toi ?

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    1. ou plutôt grâce à Anne qui a lancé un joli défi sur le sujet ! Bises et merci.

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  3. Il a l'air plein de belles phrases.....

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    1. oui, et je pense que tu en trouveras des proches de toi, suivant ta sensibilité.

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  4. Un premier roman prometteur, ça peut me plaire... mais je dois me calmer un peu en ce qui concerne ma LAL !

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  5. rhooo, mais tout ce que tu en dis me convient parfaitement. Je le note et je le surligne !

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  6. Une très belle découverte pour moi, pour l'instant la plus belle de l'année :0)

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    1. Je ne quantifie pas les belles rencontres mais j'ia aimé lire ce roman et ses fulgurances.

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  7. Thomas Vinau, c'est un bain de fraîcheur et de poésie, de tendresse envers le quotidien... Je viens de découvrir une pépite du même genre, mais chut, patience, ce sera pour la rentrée !!

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    1. J'ai hâte de lire cette fameuse pépite et ton avis, qui le sera tout autant.

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  8. Ton article est superbe et m'a replongée dans cette magnifique lecture :) Je suis ravie que tu l'aies aimé. J'ai hâte de pouvoir lire Ici ça va.
    Plein de bisous encore et belle soirée ma Phili :D

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    1. Merci à toi, Laure : tu m'as fait là un très beau cadeau. Bisous

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  9. Moi, dans les histoires, comme dans la vie, cela me stupéfie toujours le mal que les gens ont à s'aimer. Et les romanciers aiment bien donner un peu de mal à leurs personnages pour avoir une histoire à raconter.

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    1. C'est la raison pour laquelle la seconde partie m'a moins plu : j'ai trouvé le héros trop autocentré sur sa petite vie. Thomas Vinau a un peu chargé la mule à ce niveau-là. je suis d'accord avec toi.

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  10. Des éclairages et des citations qui m'ont donné envie d'aller voir de plus près ce livre et de découvrir l'écrivain.
    le personnage central a l'air attachant dans sa tentative pour se construire.

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    1. J'ai aimé l'idée d'évasion pour prendre du recul face à la situation de couple : s'éloigner géographiquement pour observer plus précisément.

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  11. J'ai préféré le côté contemplation que le côté écorché. Une très belle écriture d'instantanés qui fait rêver.

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    1. J'ai senti le côté écorché davantage sur la seconde partie, c'est bizarre mais c'est ainsi.

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  12. J'ai peur que ce genre de roman soit un peu plat et ne m'ennuie.
    Passe une bonne fin de semaine.
    Le weekend sera vite là.

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    1. Ce roman est court, il ne peut ennuyer ! Bises et bonne fin de semaine.

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  13. Je le note, même si il n'est pas à la bibliothèque.

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  14. du coup, je viens lire ton article, tu as autant aimé que moi je vois ! :)

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    1. exact et c'est un petit livre qui ne laisse pas indifférent, je trouve. Bisous

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