J'aime aller au théâtre pour y contempler des classiques revisités : L'Assommoir d’Émile Zola en fait partie.
Très tôt, je repérai cette version proposée par le metteur en scène David Czesienski et me précipitai pour acheter deux billets. Puis vint le temps de la récupération des places et le visionnage de quelques photos concernant sa mise en scène plutôt moderne et là, mon esprit quelque peu endormi me suggéra ce questionnement : « Non mais, elle est où, Gervaise ? ». Parce qu'avec toutes ces images flashy, il me sembla difficile de la repérer. Enfin, le soir du spectacle s'annonça. Et ? Eh, oui !
photo issue du carnet de présentation de l’œuvre fait par le th'N |
Six amis se retrouvent dans un salon pour faire la fête (enfin, picoler serait le mot adéquat). Tout est prétexte à narrer les mésaventures de Gervaise, l'héroïne de Zola, éternellement partagée entre Lantier (père de ses deux aînés) et Coupeau (père de son unique fille, Nana), sa réussite puis sa déchéance. Au fil de la narration, l'ambiance festive gâchée par l'alcool bu en abondance laisse place aux règlements de compte, à l'échange de partenaires et plus, si affinités.
Bon, alors autant être directe : il y a du bon et du moins bon dans cette pièce.
les + : l'entrée en scène des comédiens tout de suite au contact du public, la volonté farouche de David Czesienski à transposer la déroute des Lantier-Coupeau à celle des convives (même beuverie, mêmes simulacres de couples, même débauche), à démultiplier la voix de Gervaise (chacun des comédiens s'accaparant ce personnage à l'aide d'une chaussure levée ou d'un pied plié) ce qui la rend omnisciente (un bel hommage théâtral à cette héroïne), à raconter l'Assommoir de façon anarchique et non chronologique (qui demande une certaine constance dans la diction mais n'empêche pas la lassitude s'installer), à distiller (foutu alambic) une bonne dose d'humour, à placer des histoires drôles pour dynamiter la fin (avec l'excellente prestation de Baptiste Girard, qui éclabousse tout sur son passage : bons déplacements, nuance dans le jeu, gestuelle corporelle élastique), à redéfinir la scène du lavoir (sans nier le risque de friser la comédie de boulevard) ou à introduire notre Johnny national (formidable chanteur aux penchants éthyliques reconnus).
les - : j'ai suivi, j'ai perdu pied, je me suis ennuyée puis réveillée (avec les scènes de ménage et l'hystérie qui parfois en découlait). Tenir en haleine 2h10 (sans entracte) un auditoire en ne changeant pas de décor, ni de comédien relève de l'exploit : le problème est que le texte manque singulièrement de finesse. Oui, Czesienski peut autant choquer que Zola lorsque l'Assommoir fut publié mais rien ne remplace les mots/ le lyrisme du maître. L'irrégularité et l’exubérance de certaines prestations et des « moments » surjoués de la mise en scène/texte gâchent une mise en abyme intéressante (avec une perspective qui aurait mérité un traitement moins proche de celui du vaudeville). Difficile aussi de ne pas être dérouté(e) par ce zapping constant qui noie le (juste) propos.
En bref, j'ai souri, j'ai ri mais je n'ai pas jamais été émue par le destin de Gervaise : un comble, non ?
En bref, j'ai souri, j'ai ri mais je n'ai pas jamais été émue par le destin de Gervaise : un comble, non ?
L'Assommoir
d'après Émile Zola
metteur en scène : David Czesienski
un spectacle du collectif OS'O
et un de plus pour le challenge d'Eimelle
en tous cas, ça a l'air original... mais spécial!
RépondreSupprimerexact : ce sont en effet les termes.
Supprimeren tout cas, c'est bien noté pour le challenge, merci!
RépondreSupprimermerci, Eimelle, d'assurer cette organisation.
SupprimerIl faut dire que le roman n'est pas des plus réjouissant.
RépondreSupprimerpas gai mais bien à lire : j'en garde un excellent souvenir. Bises
Supprimerfan de Zola à l'adolescence , je garde un souvenir différent de ce que tu dis de la pièce mais c'est toujours intéressant de voir l'interprétation de chacun il faut que je le relise pour voir si je suis toujours accro
RépondreSupprimerla pièce est très éloignée du roman originel : c'est voulu ! Une façon de prendre du recul de la part du metteur en scène. Bises
SupprimerJe suis normalement assez tolérante avec les adaptations modernes au théâtre (pas du tout avec l'opéra par contre). Mais là, on touche à mon auteur chouchou, plus un des romans que j'ai beaucoup aimé et ta description me laisse songeuse. Pas sûre d'être tentée....
RépondreSupprimerje serais vraiment contente que tu voies ce spectacle, juste pour le plaisir de découvrir ton avis. Bises
SupprimerUn comble certainement. Grâce à ton billet j'ai très bien imaginé le spectacle qui m'en a rappelé d'autres... De toute façon, sauf exception....exceptionnelle, plus de deux heures sans entracte, c'est trop pour moi ! (Pas fière !)
RépondreSupprimerje pense aussi que je décroche pour la raison : + de 2h de spectacle et sans entracte ! Bises et merci de ton doux mot.
SupprimerC'est toujours intéressant de voir des adaptations contemporaines, au rique d'être un peu déçue. Par contre je suis sceptique au théâtre comme au cinéma sur les spectacles de plus de 2h, il y a toujours un moment où je décroche. En tout cas, merci pour ce billet qui titille ma curiosité.
RépondreSupprimerIl mérite une attention particulière. Mais je pense que l'auteur n'est pas allé au bout de sa logique, ou bien de façon pas assez subtile : mais cela reste mon avis !
SupprimerLa mise en abyme est intéressante mais c'est vrai que c'est très difficile à réussir. Et puis Zola a ses outrances mais il a aussi comme tu le dis un lyrisme et une puissance dont tout le monde n'est pas capable.
RépondreSupprimerQuant à la longueur d'une représentation, je râle souvent parce que je rate des spectacles au festival d'Avignon; je ne me sens pas capable de passer toute une nuit sur des gradins pour un spectacle qui dure six, huit, dix heures ou plus! etc...Et quand en plus il arrive qu'on s'ennuie les heures paraissent se multiplier! Pourtant j'aime énormément le théâtre!
je pense que l'auteur aurait pu éviter l'exubérance : c'est mon principal reproche de cette pièce. La finesse laisse place au "trop plein" et c'est dommage.
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