La chance de leur vie - Agnès Desarthe **** [RL2018 #1]

J'aime bien l'écriture d'Agnès Desarthe, j'aime bien cette auteure. Je trouve qu'elle s'invente, qu'elle ne reste pas sur un thème déterminé, qu'elle utilise une langue propre, qu'elle n'hésite pas à triturer, à vulgariser. Parfois certains passages sont super imagés, beaux ; d'autres sont propres à la langue du quotidien, poétique aussi. Il y a une vraie dignité et une grande sincérité dans sa façon d'aborder la vie, ses créatures, sans complaisance mais aussi sans mièvrerie. Bref j'aime beaucoup l'univers d'Agnès Desarthe, j'ai toujours plaisir à le retrouver et on va dire qu'après avoir lu La chance de leur vie, je ne suis pas prête à changer d'avis ! 
La famille Vickery débarque aux States : le père, Hector, philosophe et poète, convié à partager ses savoirs universitaires et autres un temps donné en Caroline du Nord ; la mère, Sylvie, femme au foyer tout le temps, en proie à l'introspection et à l'observation momentanément ; le fils rebaptisé, Lester, en charmante crise mystique, sujet aux salves pertinentes. Le trio détonne et perturbe les habitudes installées. Dans une ville où tout se sait, le moindre écart sert aux discussions, est disséqué puis tancé. 

Agnès Desarthe présente une famille d'expatriés en perte de repères, entre les attentats parisiens et l'avènement de Trump. L'homme se découvre, la femme explore et le fils touche. Il n'y a rien de graveleux, tout est fait en conscience. Il est inutile d'en dévoiler plus. La plume d'Agnès Desarthe se déguste. Dans La chance de leur vie, vous y découvrirez des personnages touchants, honnêtes et sincères à leur façon, déboussolés par une nouvelle existence et d'autres relations ; un couple solide et un adolescent résistant, continuellement en ressources. Les souvenirs français côtoient le quotidien américain : le choc des cultures est ébranlé par celui des attentats. 
Sylvie, tantôt antipathique et froide, se révèle profondément humaine. Son regard sur sa vie passée et sa réussite artistique sont sans concession. Le trio qu'elle forme avec son mari et son fils unique ne se dissout jamais, chaque personnage ravive l'autre : par ses mots, par ses pensées, par ses faits, par son regard, Sylvie entretient le groupe. Vraiment réussi.

Editions de l'Olivier

Page 54 : " C'est étrange ... comme ce grand bond vers un avenir incertain, ce voyage au bout du monde, dans un pays inconnu et neuf, au lieu de lui ouvrir les ailes vers une vie à conquérir, la replonge sans qu'elle le veuille, dans le passé. Jamais elle n'avait, avant de poser le pied sur ce sol étranger, tourné son regard vers le temps d'avant. C'est comme si, par la magie du déplacement, elle se retrouvait non plus face au futur, mais braquée vers l'enfance, sa propre enfance, sa jeunesse qu'elle n'avait pas pris de ressasser. Elle se sent pareille au promeneur qui, après s'être concentré sur l'ascension, jette un regard paisible, lavé par l'épuisement du corps, en direction du chemin accompli, tout en reprenant haleine. "

avis : Alex

Mon exemplaire voyage pour les blogueuses et les blogueurs dont je consulte ou connais les sites et éventuellement pour leurs connaissances. N'hésitez pas à me le réclamer.

De l'auteure :

9 commentaires:

  1. Tu me donnes envie, même si mes rencontres avec cette auteure m’ont laissé mitigée ... biSous ! Une Comète

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  2. Moi aussi tu me donnes envie... On verra!

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  3. Je retrouverais bien cette auteure, j'avais lu et aimé Dans la nuit brune et... rien lu d'autre, dommage !

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  4. Pas certaine d'en faire une priorité en cette rentrée prolifique mais je note quand même...!

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  5. J'ai un avis plus mitigé : j'ai trouvé que le fils n'était qu'un outil pour clore le roman. J'ai aimé Sylvie dès le départ.

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    1. Je ne suis pas de ton avis : le père présentait aussi un argument de poids pour clore le roman (surtout dans une société si policée). J'ai bien aimé ce "fils-là" différent.

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  6. Je n'ai jamais lu cette auteure je crois, sauf en littérature jeunesse peut-être. Pourquoi pas, si on le trouve à la bibliothèque.

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  7. Figure-toi que je me souviens que nous avions fait une lecture commune, il y a bien longtemps, sur "Dans la nuit brune". Je n'ai rien lu d'autre d'Agnès Desarthe mais je me souviens avoir beaucoup aimé.

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  8. Je note aussi, je suis intriguée par le côté français aux etats-unis !

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