L'enfant des tempêtes - Mélanie Guyard (entre *** et ****)

L'enfant des tempêtes narre quelques jours de vie de Mathieu et de sa mère, esseulés après le décès du père, réfugiés sur l'île d'Oléron, le temps de fêtes familiales à fuir quand on souffre. Bousculés par un quotidien en mal d'équilibre, ils vont également sentir les déferlantes maritimes venir. Car la tempête du siècle, Lothar, du 26 décembre 1999 s'annonce, prête à faire des ravages.


Ce pâle résumé ne dit pas le principal, il explique juste un couple fils-mère qui ne cesse de se perdre et de se retrouver : chacun cherche à survivre à l'impensable perte d'un être aimé et aimant, chacun a peur de perdre le survivant mais le fuit quand même. Mathieu tente des expériences de plus en plus périlleuses avec son grand copain Corentin, la mère s'attache à disparaître avec les comprimés ingurgités. Tous deux font face, se font face. Tous deux ne se comprennent plus, et se parlent peu.

L'enfant des tempêtes aborde l'impossible deuil, l'entrée dans l'adolescence et la quête d'absolu que rien ne freine, la résilience face à un trauma trop douloureux à supporter. Mélanie Guyard fait preuve d'une belle dextérité romanesque, suggère les non-dits, laisse constamment le mystère planer sur le personnage atypique de Corentin, sur l'essence même de Mathieu aussi. L'élément nature prend du poids, de la forme tout au long du roman. Les nombreuses virées de Mathieu, les assauts tempétueux font monter la tension.  

L'enfant des tempêtes est un roman étonnant, de texture classique dans le moderne, bien écrit, qui s'inscrit dans la mouvance métaphysique, onirique de Le Caillou de Sigolène Pinson, dans l'histoire d'une génération  comme Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu ou Noël en février de Sylvia Hansel, comme une référence au roman D'après une histoire vraie de Delphine de Vigan.  

Mélanie Guyard fait preuve d'une belle intelligence narrative, construit son intrigue par des détails ou des événements qui paraissent anodins mais qui comptent : un caillou, un couteau, un vélo, des prénoms. Avec un titre énigmatique et ô combien éclairant, L'enfant des tempêtes offre un moment très sympa de lecture, une parenthèse ventée à défaut d'être totalement enchantée, idéale en ces temps automnaux. 

 J'ai eu la grande chance d'être sollicitée pour lire ce roman lors d'une Masse critique du site Babélio (que je remercie pour ce très bon choix) en partenariat avec les éditions Seuil qu'on ne présente plus.

Éditions Seuil 

Sortie octobre 2020.

14 commentaires:

  1. Je n'en ai pas entendu parler ; à voir éventuellement si je le trouve à la bibli.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ok sinon je te l'envoie en te l'offrant, ce qui évitera des frais d'envoi inutiles.

      Supprimer
  2. Pas sur que je sois le bon public...

    RépondreSupprimer
  3. Si tu cites Le Caillou, je ne peux que le noter !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le Caillou pour le côté île, le côté quête, le côté ombre... Je ne t'en dis pas plus.

      Supprimer
  4. Je l'ai déjà vu quelque part, mais je ne le connais pas plus que ça.
    Tu donnes envie de le lire même si tu ne lui mets pas 5 étoiles !
    Bon dimanche.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ce n'est pas un coup de coeur mais un bon moment de lecture, avec de belles qualités.

      Supprimer
  5. Belles références ! Je n'avais pas du tout entendu parler de ce livre...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il vient de sortir... Et fait face à la concurrence des autres parutions récentes et des vagues de prix littéraires.

      Supprimer
  6. Arf, la mouvance métaphysique et onirique, c'est pas du tout mon truc !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je pense que tu pourrais aimer car l'intrigue principale reste dans le concret et le "normal". Ce sont les évènements énigmatiques qui surgissent qui questionnent. Ce qui est très intéressant est le traitement qu'en fait l'autrice et qui laisse des portes ouvertes et des interprétations diverses. Et cela, j'aime beaucoup.

      Supprimer
  7. Une parenthèse ventée ? Tu m'intrigues.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On sent l'atmosphère à plein nez dans ce roman. Voilà pourquoi le "ventée" !

      Supprimer