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Les plus qu'humains - Théodore Sturgeon ****

J'ai lu Les plus qu'humains, un roman qui date des années 1950 grâce à Miss Little World qui en a fait un coup de cœur. Ce n'est pas mon cas mais ce n'est pas loin.
J'ai lu une première fois au complet le livre, et mon ressenti de lecture est passé de *****, puis à  **** pour finalement aboutir à *** : j'avais compris et apprécié la première partie (rencontre des héros, leur passé), j'ai perdu le fil dans la seconde partie. Mais mon esprit cartésien ne s'arrêtant pas à un obstacle cognitif, j'ai relu le roman (en mode rapide parce que j'avais bien retenu certaines scènes). Et même après cette seconde lecture, ce n'était pas complètement clair pour moi parce que le récit de la seconde partie a été légèrement sabordé et aurait mérité plus de travail (parce qu'il y a une vraie belle matière) et d'explicitations. Mais j'ai eu besoin de le relire et pour qu'un auteur m'invite à redécouvrir son œuvre et à pousser mes limites, c'est qu'il y a une accroche intéressante. Les plus qu'humains fait partie des œuvres artistiques dont les interprétations sont multiples et suffisamment ouvertes pour être discutées dans le temps (du type Mulholland Drive de David Lynch). Et surtout j'y ai retrouvé le même univers que celui de La nuit des enfants rois, un roman exceptionnel de Bernard Lentéric.

Résultat : je stabilise mon ressenti de lecture **** définitivement et je précise que ce "fantastique" littéraire est à lire absolument, parce qu'il possède une touche romanesque très très très rare dans ce style d'écriture que je trouve souvent froid. Mais je reconnais aussi que l'auteur m'a perdue lors de ma première lecture (et que ce n'est pas complètement gagné après la seconde lecture, surtout que l'auteur aurait pu faire autrement et en dix fois mieux) et pour moi, c'est un peu rédhibitoire.

Les plus qu'humains sont au nombre de cinq : un idiot (Tousseul), deux jumelles (Bonnie et Beanie), une jeune fille introvertie (Janie), un bébé trisomique (Bébé). Un autre va se rajouter au groupe plus tardivement. 

La première partie de Les plus qu'humains narre l'itinéraire de Tousseul, un homme dont on sait peu le  passé, un être rejeté qui navigue dans la forêt, se trouve une famille d'adoption et puis... il y a l'itinéraire des quatre autres, leur enfance, leur foyer familial. Tout ce beau monde décide de cohabiter un jour ensemble pour d'abord vivre mieux et puis survivre. Mais leur attirance n'est pas fortuite et leur union avant tout humaine va faire des étincelles.

Comme je l'ai précisé en introduction, Les plus qu'humains est un roman fantastique pour deux raisons : il traite de science-fiction, le récit est remarquable : on est bien dans un roman (une narration quasi linéaire en première partie, moins en seconde partie ; des descriptions marquées ; des personnages ronds, charnels, super bien exploités et dessinés ; une maîtrise du récit impeccable), avec des entrées de surnaturel mais qui passent comme quelque chose de normal. 

Tout est pesé chez Théodore Sturgeon : chaque pièce du puzzle n'intervient jamais au hasard. C'est puissant, riche, hyper intelligent, d'un côté machiavélique, d'un autre un peu cucul la praline (la fin est décevante). Il y a un réel art de la construction. Toutefois il y a deux chocs narratifs à la fois justifiés (car ils relancent le rythme du récit et attisent la curiosité des lecteurs) et très perturbants (au point de risquer de perdre le lectorat... ce fut mon cas) car mal introduits et pas suffisamment nourris en explications à la fin : une consultation psy et l'itinéraire d'un soldat. Je n'en dis pas plus.

Théodore Sturgeon interroge sur l'intégrité physique, sur l'identité et la différence, sur la solitude humaine, sur  la conception d'un groupe social puis celle d'une entité avec des codes à construire et une morale à définir. La date de parution de l'ouvrage (1953) montre aussi l'exemplaire anticipation de son auteur sur nos sociétés actuelles. 

En bref, à vous de voir ou de lire !

J'adresse un grand merci à Miss Little World pour son avis qui m'a décidée. 

Éditions J'ai lu

Traduction de Michel Chrestien et de Pierre-Paul Durastanti

autre avis : Miss Little World

Le voleur de voix / Tome 2. La diva et le prince romantique - Jean-Nicholas Vachon ***

On retrouve Maximilien et ses copains, les vampires (enfin, copains est vite dit, tant cet être a l'art et la manière de s'attirer tous les ennuis de la Terre). Un petit rappel s'impose : dans Le castrat et les rois fous (le tome 1 de la série Le voleur de voix), on découvrait la métamorphose du jeune homme en héritier de Dracula. Malheureusement pour moi, j'avais raté moult détails mais c'était sans compter l'auteur, Jean-Nicholas Vachon, qui se charge au cours de ce tome 2 de nous rappeler le passé de ce petit monde (et plutôt quatre fois qu'une ! Oui, mais il faut bien cela, parce que je ne suis pas sûre d'avoir tout saisi).
Maximilien reste un vampire à part : un être doté d'une double damnation (un deux en un, en quelque sorte). Bon, à sa création, on était au courant de l'existence de l'asura indien dénommé Vahram Chubin (protecteur du diamant Hope, œil de la déesse Kâlî) : V.C (aux initiales pittoresques et toilettées) reste sanguinaire et intime au corps qui le possède d'exécuter les crimes les plus odieux. Bref, pour résumer, Maximilien vit des moments totalement criminels, hanté par cet esprit un peu chaud, profondément rancunier, instable et belliqueux ! Pour parfaire la situation, notre éternel jeune homme (un brin ténébreux... normal, vous allez me dire !) est également occupé par un second esprit, celui du séraphin de Perse (késako ? un séraphin est le top du top en matière de vampire : hyper-puissant, il contrôle tout avec son cercle de séraphins... je vois que vous suivez !). Vous allez me demander, déjà emballé(e) et sous le charme : mais pourquoi un séraphin a besoin d'un pauvre guignol jeune homme alors qu'il possède de grands pouvoirs ? Mais pardi, parce qu'un vampire vieillit  ! (oh the big news). Disons que son corps se délite avec le temps et pour éviter la décrépitude physique, le vampire doit changer de logis corps. Bon, le séraphin de Perse, lui, a des envies d'amours phalliques voire des pulsions sexuelles assez prononcées (deuxième nouvelle : un vampire peut désirer charnellement. Les aficionados de Twilight le savaient déjà). Résultat, notre Maximilien qui n'a rien demandé du tout, doit gérer tantôt son penchant sanguinaire tantôt l'amoureux. Mais surtout, cette bête immonde devient un gros souci à gérer pour les séraphins pas contents du tout de découvrir un vampire plus puissant qu'eux. Alors, pour calmer les ardeurs de Monsieur, reste le chant divin capable de l'apaiser (et nous avec), à ravitailler régulièrement en chair fraîche !
On y retrouve les héros du premier tome : le castrat Carlo Broshi alias Farinelli, la diva Maria Felicia Garcia dont le nom de scène vous rappellera un petit quelque chose, un nouvel arrivé dans l'histoire Paul et bien sûr du côté humain, Nathaniel, son amour de toujours Viviane et sa maman assez mal embrochée aux révélations fracassantes.
J'ai lu avec plaisir La diva et le prince romantique mais je regrette certaines invraisemblances (en particulier, l'importance de l'éther dans le soulèvement populaire de la Révolution Française et l'effet des séraphins sur l'ordre royal sont largement révocables.) et une coïncidence parentale aussi exagérément grosse que la ficelle du Da Vinci Code de Dan Brown. Le récit me semble bien construit et nourri historiquement, une jolie parité s'installe (appréciable), les vampires féminins devenant aussi détestables et aussi cruelles que leurs pendants masculins. La fin est réussie et relance bien l'intrigue. L'écriture mériterait plus de fluidité. Un petit clin d’œil à Sharon : Sissi et son cousin Ludwig font une entrée remarquée ! À vous de voir si vous aimez le genre ou si vous voulez le découvrir.

Editions Michel Quintin (je remercie Marine Gastinel, leur attachée de presse en France, pour l'envoi de ce SP contre critique et pour sa confiance).
Date de parution programmée : le 16 mai 2012

Le voleur de voix / Tome 1. Le castrat et les rois fous - Jean-Nicholas Vachon ***

Tout a commencé par un petit contact de Marine Gastinel, attachée de presse des éditions québécoises Michel Quintin, qui me proposa un partenariat «livre contre critique» sur le tome 2 de la trilogie Le voleur de voix de Jean-Nicholas Vachon (sortie prévue du numéro 2, courant mai 2012). Je lui répondis que les thèmes abordés (fantastique et histoire de la musique) n'étaient pas de prédilection chez moi mais comme je le précise souvent, 2012 année de changement littéraire pour moi, je ne suis plus à un challenge près ! Toutefois, Marine, consciente de ma lourde tâche (je précise tâche de lecture, et non tache qui pourrait me dénoter, tout de même !) proposa de m'envoyer le tome 1, Le castrat et les rois fous, histoire de baigner dans l'ambiance des vampires, des castrats, des rois malades : Yeah , tout un programme électoral littéraire !
Verdict : on s'attache vite à ces petites choses !  
Traduction : j'aimerais bien connaître la suite (étant sujette au défaut de curiosité complètement assumé).
Les vampires et moi, nous connaissons bien. Pour comprendre l'engouement de ma tranche d'âge préférée (les adolescents), j'ai déroulé la série Twilight (à part le tome 4 qui me semble réussi, le reste ressemble à s'y méprendre à du bon vieil Harlequin pour jeunes, mais dans le genre insipide, bavard, mal écrit où 500 pages se résument en 25 feuilles : unique avantage, apprécier le physique de Roby ! ). Mais revenons à Le castrat et les rois fous, ouvrage plus consistant littérairement, historiquement et assez inventif, malgré des défauts de style et des coïncidences un peu trop visibles !

537 pages constituent ce livre copieux : à l'intérieur, on découvre les mémoires du vampire Maximilien, le quotidien de Nathaniel, professeur d'université missionné par des lois ancestrales (un de ses aïeuls s'est porté garant d'un soutien auprès d'un descendant d'une autre famille : cette transmission s'effectue aux vingt-cinquième anniversaire de l'héritier mâle, sans qu'il ait conscience de la nature de l'aide à apporter) et enfin l'existence de Carlo Broschi, castrat fabuleux dont le nom de scène  Farinelli vous rappelle sûrement quelque chose et qui, par sa gloire, connut la cour d'Angleterre et ensuite le règne espagnol du mélancolique et mélomane Philippe V, désireux de posséder ce talent unique. Ces vies emmêlées alternent le long du récit pour se retrouver très vite. Le puzzle se constitue de façon intelligente et au moment où on sait tout, le mot FIN apparaît, laissant un sentiment de frustration : on a envie de connaître la suite ; il est vraiment trop fort , ce Jean-Nicholas !

Comment naît-on vampire ? Plusieurs possibilités s'offrent à vous :
 a) vous vous amusez à voler le plus beau diamant bleu existant sur Terre, le Hope, pierre destinée à la déesse indienne Kâli, bien déterminée à protéger son bien par un esprit malsain, un asura assez remonté ou
b) vous vous rapprochez d'un vampire (mais sachez qu'une morsure ne vous transforme pas d'office, même si elle vous marque de façon indélébile dans l'éther, fluide entretenu par la meute pour identification rapide) et...

Comment devient-on un castrat ? Il faut déjà être un garçon, posséder une voix quasi-féminine et subir une ablation sexuelle (en espérant qu'elle ne perturbe pas votre qualité vocale intrinsèque, sinon c'est la double peine, dans tous les sens du terme !). Les femmes au XVIIIè siècle n'étaient pas autorisées à chanter en public, dans des salles prestigieuses. Résultat : on sélectionne les garçons dont la tessiture vocale se rapproche de celle d'une femme, quitte à les mutiler jeunes.

Comment arrive-t-on à rencontrer tout ce beau monde ? Il faut avoir un sacré coup de pas de bol, du genre une poisse familiale à respecter. Malgré un bon gros magot à récupérer, notre intellectuel préféré Nathaniel se dit qu'il y a des claques ancêtres qui se perdent, capables de lui pourrir l'existence ainsi que celle de son ex-toujours amour Viviane, médecin de son état (cette profession peut servir, va servir).

Vous ne comprenez toujours pas, eh bien lisez cette œuvre ! On y apprend plein de choses sur la vie des chanteurs lyriques, les rois tyranniques mais complètement possédés, la mutation d'un vampire et les différentes clans ; on revit une époque où l'art lyrique restait un passe-temps favori des rois (pas de télé, pas d'internet ! Mais comment faisaient-ils ?). Le chant calme certains vampires, en perturbe d'autres : la guerre est déclarée !

Un grand merci à Marine Gastinel pour sa confiance, aux Éditions Michel Quintin pour l'envoi de ce tome 1.